L'avantage des nouvelles c'est
que, même si l'on n'accroche pas trop à l'histoire, un peu de
persévérance suffit pour réussir à tout lire. Cela permet aussi
de se constituer un bon stock de références et d'affiner sa
compréhension du genre.
L'inconvénient des nouvelles,
c'est que l'on a tendance à les lire beaucoup plus vite qu'on ne les
chronique ; encore plus quand on fait le choix de faire une
chronique pour chaque nouvelle …
Voilà comment j'en viens à
cumuler un retard de 10 chroniques … C'est d'autant plus gênant
que certaines sont tellement passionnantes qu'on en oublie quasiment
complètement l'histoire des autres …
Bref, voici mon entrée en
matière pour Onuphrius, texte de Théophile Gautier, paru
pour la première fois en août 1832 dans La France Littéraire
sous le titre Onuphrius Wphly. En 1833, cette nouvelle de 39
pages (format poche) adopte son titre définitif : Onuphrius,
ou les vexations fantastiques d’un admirateur d’Hoffmann
(plus long, mais plus facile à lire).
Au
départ, je m'attendais donc naturellement à ce qu'il soit question
d'ETA Hoffmann dans le texte, mais en dehors du titre, le nom
n'apparaît qu'une fois dans le texte. Sur le coup, j'en étais un
peu déçu. Maintenant que je commence à connaître plusieurs textes
de ces deux auteurs, je me rends compte de la corrélation entre les
deux ou plutôt de la manière dont Gautier s'inspire des histoires
d'Hoffmann.
Onuphrius, c'est
l'histoire d'un peintre poète qui, par ses lectures fantastiques,
voire occultes, a tendance à voir l'empreinte du diable partout …
Devant peindre le portrait de Jacintha, il s'aperçoit que tout
s'oppose à son travail. Quand il souhaite la rejoindre, le temps
s'échappe et il arrive trop tard. Une nuit, il rêve de sa mort et
se rend compte qu'un autre s'est approprié son œuvre et son succès.
Comme
chaque fois, il est difficile de résumer l'histoire sans spoiler
l'intrigue. Alors étant donné que ce blog est un peu la mémoire de
mes lectures, je vais m'autoriser à un petit laisser-aller
mnémotechnique en disant qu'Onuphrius vit un peu la même situation
que Bon-Bon
mais que l'homme au rubis rouge n'a finalement pas les mêmes
intentions …
En
relisant en diagonale cette nouvelle qui sur le « long terme »
(moins de 6 mois quand même) ne m'avait laissé aucun souvenir, je
me rappelle qu'elle m'avait alors plu car elle est très concrètement
emprunte de fantastique. Elle m'avait de plus redonné très envie de
lire du Hoffmann de par ses références : le chat Mürr et la
nuit de la Saint-Sylvestre, dernière nouvelle du recueil Contes
d'Hoffmann. Mais comme je le disais en intro, certaines nouvelles
nous laissent un souvenir indélébile et occultent d'autres qui, à
mon goût, manquent peut-être d'actions.
Je me permets ici de
copier-coller un paragraphe du site Théophile
Gautier pour évite de paraphraser leurs propos :
« Cette
nouvelle est fortement inspirée de divers récits d’Hoffmann :
Onuphrius emprunte au héros du « Vase d’or »,
persécuté comme lui par des visions grotesques. La maîtresse
d’Onuphrius, Jacintha, doit son nom à la Giacintha de La
Princesse Brambilla. Mais encore, le thème du miroir
au reflet fantastique se trouve dans « La Nuit de la
Saint-Sylvestre » et l’épisode du portrait
défiguré présente une certaine parenté avec un passage des
Élixirs du diable. L’épisode du
mort vivant vient certainement de contes publiés de manière anonyme
par Robert Mac Nish dans Le Mercure de France
en 1829 (« La Mort ressuscitée », « la
Métempsycose », « Un Pythagoricien moderne »). »
N'ayant
pas encore lu La Princesse Brambilla, La Nuit de la
Saint-Sylvestre ou Les élixirs du diable, je ne peux pas
encore attester mon avis sur ses points. En revanche, je ne trouve
pas qu'Oniphrius emprunte au personnage du Vase d'Or :
l'étudiant Anselme ne doit ses aventures qu'à sa nature maladroite.
Si Onuphrius enchaîne les dépits, on se rend compte au fur et à
mesure qu'elles ne sont en rien des preuves d'une maladresse
quelconque mais bien finalement les résultats de l'intervention d'un
tiers personnage.
Étant
donné qu'il semble ne pas y avoir de traduction française pour les
œuvres de Robert MacNish, il me sera difficile de me faire un avis
sur la question. Par contre, comme je l'ai déjà évoqué, cette
histoire m'a semblé avoir un lien avec la nouvelle de Poe Bon-Bon. Le
lien me semble tout aussi fort avec une autre nouvelle de Poe :
Perte de souffle. Mais ces deux nouvelles ayant été aussi
publiée en 1832, il est difficile de dire qui a inspiré qui ou même
s'ils se sont inspirés les uns les autres ou si c'étaient juste des
thèmes très à la mode à ce moment là.
Dans
tous les cas, je conseille la lecture de cette nouvelle ! Le
style est un peu ampoulé (on évoque ici la bourgeoisie française),
il n'y a pas une action transcendante mais le suspens se maintient
jusqu'à la fin et ça nous suffit.
Plus
que 9 ...