samedi 3 février 2018

Onuphrius, ou les vexations fantastiques d’un admirateur d’Hoffmann

L'avantage des nouvelles c'est que, même si l'on n'accroche pas trop à l'histoire, un peu de persévérance suffit pour réussir à tout lire. Cela permet aussi de se constituer un bon stock de références et d'affiner sa compréhension du genre.
L'inconvénient des nouvelles, c'est que l'on a tendance à les lire beaucoup plus vite qu'on ne les chronique ; encore plus quand on fait le choix de faire une chronique pour chaque nouvelle …
Voilà comment j'en viens à cumuler un retard de 10 chroniques … C'est d'autant plus gênant que certaines sont tellement passionnantes qu'on en oublie quasiment complètement l'histoire des autres …

Bref, voici mon entrée en matière pour Onuphrius, texte de Théophile Gautier, paru pour la première fois en août 1832 dans La France Littéraire sous le titre Onuphrius Wphly. En 1833, cette nouvelle de 39 pages (format poche) adopte son titre définitif : Onuphrius, ou les vexations fantastiques d’un admirateur d’Hoffmann (plus long, mais plus facile à lire).

Au départ, je m'attendais donc naturellement à ce qu'il soit question d'ETA Hoffmann dans le texte, mais en dehors du titre, le nom n'apparaît qu'une fois dans le texte. Sur le coup, j'en étais un peu déçu. Maintenant que je commence à connaître plusieurs textes de ces deux auteurs, je me rends compte de la corrélation entre les deux ou plutôt de la manière dont Gautier s'inspire des histoires d'Hoffmann.

Onuphrius, c'est l'histoire d'un peintre poète qui, par ses lectures fantastiques, voire occultes, a tendance à voir l'empreinte du diable partout … Devant peindre le portrait de Jacintha, il s'aperçoit que tout s'oppose à son travail. Quand il souhaite la rejoindre, le temps s'échappe et il arrive trop tard. Une nuit, il rêve de sa mort et se rend compte qu'un autre s'est approprié son œuvre et son succès.

Comme chaque fois, il est difficile de résumer l'histoire sans spoiler l'intrigue. Alors étant donné que ce blog est un peu la mémoire de mes lectures, je vais m'autoriser à un petit laisser-aller mnémotechnique en disant qu'Onuphrius vit un peu la même situation que Bon-Bon mais que l'homme au rubis rouge n'a finalement pas les mêmes intentions …

En relisant en diagonale cette nouvelle qui sur le « long terme » (moins de 6 mois quand même) ne m'avait laissé aucun souvenir, je me rappelle qu'elle m'avait alors plu car elle est très concrètement emprunte de fantastique. Elle m'avait de plus redonné très envie de lire du Hoffmann de par ses références : le chat Mürr et la nuit de la Saint-Sylvestre, dernière nouvelle du recueil Contes d'Hoffmann. Mais comme je le disais en intro, certaines nouvelles nous laissent un souvenir indélébile et occultent d'autres qui, à mon goût, manquent peut-être d'actions.
Je me permets ici de copier-coller un paragraphe du site Théophile Gautier pour évite de paraphraser leurs propos :

« Cette nouvelle est fortement inspirée de divers récits d’Hoffmann : Onuphrius emprunte au héros du « Vase d’or », persécuté comme lui par des visions grotesques. La maîtresse d’Onuphrius, Jacintha, doit son nom à la Giacintha de La Princesse Brambilla. Mais encore, le thème du miroir au reflet fantastique se trouve dans « La Nuit de la Saint-Sylvestre » et l’épisode du portrait défiguré présente une certaine parenté avec un passage des Élixirs du diable. L’épisode du mort vivant vient certainement de contes publiés de manière anonyme par Robert Mac Nish dans Le Mercure de France en 1829 (« La Mort ressuscitée », « la Métempsycose », « Un Pythagoricien moderne »). »


N'ayant pas encore lu La Princesse Brambilla, La Nuit de la Saint-Sylvestre ou Les élixirs du diable, je ne peux pas encore attester mon avis sur ses points. En revanche, je ne trouve pas qu'Oniphrius emprunte au personnage du Vase d'Or : l'étudiant Anselme ne doit ses aventures qu'à sa nature maladroite. Si Onuphrius enchaîne les dépits, on se rend compte au fur et à mesure qu'elles ne sont en rien des preuves d'une maladresse quelconque mais bien finalement les résultats de l'intervention d'un tiers personnage.
Étant donné qu'il semble ne pas y avoir de traduction française pour les œuvres de Robert MacNish, il me sera difficile de me faire un avis sur la question. Par contre, comme je l'ai déjà évoqué, cette histoire m'a semblé avoir un lien avec la nouvelle de Poe Bon-Bon. Le lien me semble tout aussi fort avec une autre nouvelle de Poe : Perte de souffle. Mais ces deux nouvelles ayant été aussi publiée en 1832, il est difficile de dire qui a inspiré qui ou même s'ils se sont inspirés les uns les autres ou si c'étaient juste des thèmes très à la mode à ce moment là.


Dans tous les cas, je conseille la lecture de cette nouvelle ! Le style est un peu ampoulé (on évoque ici la bourgeoisie française), il n'y a pas une action transcendante mais le suspens se maintient jusqu'à la fin et ça nous suffit.


Plus que 9 ...

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire